Cirrus

né en 1959 à Lorient, France
vit et travaille à Paris, France


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Cirrus, L’espace et nous, Rennes, 2003
dans le cadre de l’exposition, Art envie, La Criée centre d’art contemporain, Rennes, 2003

photo : Benoît Mauras

L’espace et nous, 2003

pulls colorés, intervention dans l’espace public
2 rue de l’Horloge et 23 rue du Champ Jacquet, Rennes

Cirrus a réalisé à Paris et à Rennes une succession d’interventions dans la rue qui consistent à empiler des pulls colorés dans des encadrements de fenêtres.

Chacune des interventions dure entre trois et quatre heures et se développe en plusieurs temps : au début les passants sont confrontés à cette accumulation de vêtements, puis l’artiste affiche une simple feuille indiquant : « Vous pouvez vous servir à partir de 17h30 » et sur certains pulls des étiquettes « Réservé », enfin vient le moment où chacun peut effectivement emporter un pull. Pendant tout ce temps, Cirrus filme discrètement la réaction des personnes. Ainsi, au moment même où l’action se déroulait dans les rues de Rennes, les vidéos des interventions déjà réalisées à Paris étaient projetées dans l’espace d’exposition de La Criée. Ces deux approches permettent deux lectures différentes de l’œuvre, alors que dans l’espace urbain le passant est acteur d’une situation dans laquelle il n’identifie pas ce qu’il a devant les yeux, dans le deuxième contexte il devient spectateur d’un « objet » dont le statut d’œuvre d’art est complètement induit par les spécificités du lieu.

Dans l’intervention L’espace et nous, l’irruption d’un élément insolite dans la ville et l’absence d’indication viennent perturber le regard et les codes que nous adoptons dans un environnement donné. Cirrus interroge par-là notre comportement habituel dans l’espace urbain – attention, flânerie, empressement, curiosité, indifférence – et la façon dont on va opérer un déplacement physique (prendre du recul, s’approcher, toucher) et mental (transposer un espace domestique dans la ville) pour appréhender cet « objet ».
Par ailleurs, L’espace et nous n’est pas sans évoquer encore une fois les questions picturales souvent présentes dans le travail de Cirrus. Sur le mur, l’installation se lit comme un tableau dont la composition est pensée et chaque fois renouvelée. L’artiste joue avec les couleurs des vêtements telles qu’avec des touches de peinture, les matières, les contrastes et la surface rugueuse du mur, agissant comme cadre.

Alexandra Gillet


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Cirrus, Appropriation, Rennes, 2003
dans le cadre de l’exposition, Art envie, La Criée centre d’art contemporain, Rennes, 2003

photo : Benoît Mauras

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Cirrus, Appropriation, Rennes, 2003
dans le cadre de l’exposition, Art envie, La Criée centre d’art contemporain, Rennes, 2003

photo : Benoît Mauras

Appropriation, 2003

pièces de puzzle en carton, silicone, peinture, intervention dans l’espace public réalisée pendant trois jours en collaboration avec un groupe d’habitants du quartier de Bréquigny à Rennes

Appropriation consistait à réaliser, en assemblant des pièces de puzzle, un angle en carton qui viendrait dessiner le prolongement d’un immeuble. L’idée de prendre possession d’un espace public impliquait pour l’artiste d’intégrer lui-même la vie du quartier. Il s’est donc installé pendant deux semaines dans le quartier de Bréquigny pour y travailler avec des habitants. Une fois la construction achevée, chaque personne pouvait choisir une couleur lui évoquant un lieu, un souvenir ou un rêve, et recouvrir la surface en carton de cette même couleur. Installée dans cet environnement à présent « familier » ou tout au moins personnalisé, elle venait raconter son histoire. Cette deuxième étape de l’œuvre donnera lieu à la réalisation d’une vidéo.

Cirrus réalise des interventions qui, en investissant l’espace urbain, viennent perturber notre regard et notre relation à cet espace. Alors que nous la pratiquons quotidiennement, la ville nous échappe de plus en plus. Concentrée, rationalisée, elle ne laisse aucune place au no man’s land, au vide. En choisissant le quartier de Bréquigny, Cirrus pointe du doigt un urbanisme apparemment peu préoccupé par le cadre de vie des habitants au profit d’une architecture fonctionnelle. Une ville soustraite à ses habitants. Appropriation est né de l’observation de ces restes de tapisseries, de peintures, de cloisons que l’on voit apparaître après la destruction d’immeubles, comme les seuls vestiges d’une prise de possession d’un habitat. Ce déplacement de l’intérieur vers l’extérieur cherche à rendre disponible et accessible la ville. Mais cette ouverture d’une architecture qui toutefois demeure précaire et fragile, n’est pas sans évoquer la condition des sans-abri.

Alexandra Gillet


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vue de l’exposition, Art envie, La Criée centre d’art contemporain, Rennes, 2003

photo : Benoît Mauras

Monochrome rouge, 2003

Pièces numérotées de puzzle photographique, textes 15 X 21 cm chaque pièce de puzzle, dimension totale 167,5 x 117,5 cm

Durant une résidence de trois mois au centre d’art de La Criée, Cirrus a arpenté les rues de Rennes et abordé des personnes ayant pour particularité de porter un vêtement rouge. De ces rencontres il a recueilli un certain nombre de propos et réponses aux trois questions : « pourquoi portez-vous du rouge ? », « que représente pour vous le rouge ? », et « quel effet cela vous fait de porter du rouge ? ». À ces témoignages était associé un détail photographique numéroté du vêtement. Monochrome rouge assemble et recompose tous ces fragments selon l’idée du puzzle. L’ensemble prend alors la forme d’un tableau auquel vient s’adjoindre un livre compilant toutes les réponses des passants sur leur relation à la couleur rouge.

Très souvent le travail de Cirrus se décline en deux « espaces – temps » : il y a le temps éphémère et spontané de l’action, de l’échange, de la réaction, provoqué dans l’espace urbain ; duquel résulte celui, continu, de l’objet et de son exposition dans la galerie. Plus qu’une simple trace d’un processus, les œuvres de Cirrus viennent interroger les qualités ontologiques de l’œuvre d’art. Monochrome rouge entretient un rapport dialogique évident à l’histoire de l’art du XXème siècle en faisant référence aux relations et frictions qu’ont connu la photographie et la peinture : l’émergence de la photographie, les différentes réponses apportées par la peinture, son glissement vers l’abstraction jusqu’à sa forme absolue et la plus radicale : le monochrome, ou le tableau photographique qui s’est imposé au cours des années 1980. Ici, à travers le processus de création qui est donné à voir, son enregistrement, le rapport au texte, la composition du tableau (les matières, la couleur et ses nuances, les formes), l’expérience est placée au centre de l’œuvre, et ne prétend pas retracer une captation objective du réel.

Alexandra Gillet


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Exposition

Art envie

Marika Bührmann, Cirrus, Rozenn Nobilet et Pedro Pereira

du 12 septembre au 17 octobre 2003