Alain Michard

« Je résiderai durant quatre jours dans l’espace de La Criée pour y mener un travail préparatoire à la performance du vendredi. Ce qui m’intéresse là, c’est de donner une visibilité publique quotidienne à mon travail, un accès permanent, et de m’en interdire l’intimité. Par ailleurs, comme la solitude dans le travail m’est pénible, je profiterai de ce temps de présence pour donner chaque jour un rendez-vous à une personne nouvelle, artistes choisis parmi ceux perdus de vue et qui me manquent. Brèves rencontres dont je nourrirai mon travail du jour et qui pourront donner lieu à des duos impromptus, offerts au regard du public présent à ce moment là. Enfin, le soir du dernier jour, une performance sera présentée, résultat des événements et rencontres des quatre jours précédents.

Ce sont donc trois formes de présence, trois niveaux de relation avec le public, trois niveaux de regard auxquels rien de mon activité n’échappera, une fiction entre l’espace intime nécessaire et l’espace public :
1 – la présence quotidienne dans le travail, avec les rencontres fortuites que cela suppose et un type particulier de côtoiement ;
2 – le rendez-vous, rencontre programmée, pas tout à fait spectacle mais déjà spectaculaire, dont le public de passage sera témoin, pas gênant le moins du monde, inclus, mais gêné peut-être car exclu du cercle intime dessiné par ces deux corps dans l’espace public ;
3 – la performance, situation bien repérée par chacun, où public et « performer » connaissent leur place, la cherchent encore, espèrent en sortir changés. »

Alain Michard, brochure de présentation de la manifestation Déplacer, La Criée centre d’art contemporain, 2000